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Réflexion sur le pouvoir avec Michel Foucault

Publié le par Jean-Yves Alt

Le philosophe et le pouvoir

Foucault n’a pas toujours parlé du pouvoir. Au début, il refusait même d’affronter ce genre de question : psychiatrie, savoir constituaient son seul univers. Il faudra attendre quelques années pour que son discours s’inverse et qu’il ne parle plus que de cela : montrant que le pouvoir est « l’autre côté » du savoir.

Son séjour à Tunis, pendant deux années, où il donnera des cours, sera un déclencheur qui lui permettra de penser à la question politique. Foucault est vite confronté aux durs événements de la politique - 1967 est une année de grands troubles : affrontements, arrestations, « pogrom » (la question palestinienne enflammait déjà les esprits). A plusieurs reprises, il aidera les étudiants, non sans être malmené à plusieurs reprises par les autorités tunisiennes.

Enseigner autrement : le piège de l’Université de Vincennes

De retour en France, on lui propose d’enseigner à Vincennes, université aux « nouvelles méthodes d’enseignement». Cette université libre - où il serait possible d’enseigner ce qu’il veut - se révèle au bout du compte une vraie tromperie. 1969 : Vincennes fonctionne comme une poudrière. D’autres universités s’enflamment. Les cours continuent pourtant. Mais le 15 janvier 1970, Olivier Guichard, alors ministre de l’Education dénonce le caractère « marxiste-léniniste » des enseignements et supprime « l’habilitation nationale » des diplômes décernés en philosophie dans cette université. Vincennes était un piège : loin de vouloir leur laisser un espace de liberté, les autorités ont voulu « prendre » la pensée militante dans des filets. Vincennes, en définitive : une prison. Pour Foucault, il n’y a jamais eu qu’une illusion de liberté : la surveillance continue du pouvoir, (dont il va parler bientôt dans « Surveiller et Punir » en 1976) ne cessera de le hanter jusqu’à sa mort.

Le philosophe contre le pouvoir

La véritable opposition, la lutte contre le pouvoir commence avec la création du Groupe d’Intervention des Prisons (GIP). L’action du G.I.P. est très concrète : visites fréquentes auprès des détenus ; enquêtes sur les conditions d’incarcération ; manifestations de protestations en faveur des détenus ; aides aux détenus (dont la parole donnée n’est pas des moindres) ; aide à la préparation politique des procès des emprisonnés. Un manifeste brûlant, offensif, sera même diffusé à la chapelle Saint-Bernard de Montparnasse, le 8 février 1971. Foucault doit comparaître devant un tribunal pour impression de tracts sans mention d’imprimerie. Foucault découvre ce qu’est au fond le pouvoir par la lutte des prisons. Il est donc naturel que Foucault consacre un livre à la question des prisons. La prison est un phénomène récent. Il naît à peu près au même moment que l’hôpital. C’est dans « Surveiller et Punir » qu’il décrit cette expérience et surtout comment la prison a changé la condition du criminel. La détention remplace l’exécution, la cellule, le supplice. Il ne s’agit plus de tuer, mais de punir. Foucault décrit comment cette machine à punir est en fait le monstre le plus redoutable du pouvoir moderne, que rien ne peut justifier, sinon ceux qui croient aux vertus du pouvoir. Foucault veut analyser cliniquement ce modèle de vertu qu’est soi disant la prison.

La logique profonde du pouvoir ?

Le propre du pouvoir est d'exercer une surveillance continue sur l’individu. Ce qui caractérise le pouvoir moderne, ce n’est pas d’agir par intermittence, comme le roi jadis sur ses sujets, mais c’est un contrôle en permanence. La question n’est plus qui tient les rênes du pouvoir : le président, les juges, les capitalistes. Mais comment s’exerce le pouvoir qui touche chacun de nous que nous soyons simple cuisinier ou que nous soyons le Président. Le pouvoir est omniprésent et universel. Personne n’échappe à son emprise. C’est notamment dans « Surveiller et punir » et « La Volonté de Savoir », écrits respectivement en 1975 et 1976, que Foucault déploie cette logique du pouvoir. Le pouvoir se profile comme un « réseau de forces », plutôt que comme l’action d’une classe, ou d’un appareil d’Etat. L’expérience du G.I.P révèle à Foucault combien le pouvoir est partout dans la société et continuel : le détenu n’est pas soumis à la force au moment où il est intercepté après son crime jusqu’à sa mise en détention. Derrière les murs de la prison, il est obligé de suivre des ordres, il est soumis à une surveillance nuit et jour, 24 heures sur 24. Malgré lui le détenu voit progressivement que le monde carcéral est un monde, certes, en retrait de la société des autres hommes, mais en même temps purement utopique. C’est un non-lieu, le lieu même de la Loi. Tout geste est contrôlé, interprété. Le pouvoir s’exerce aussi hors les murs de la prison. Partout : à l’armée, à l’école, dans le foyer familial. Le but : établir un contrôle du corps du détenu, du soldat, de l’écolier, de l’enfant, de l’homme d’entreprise. Le pouvoir contrôle tout dès notre naissance : ne naissons-nous pas dans les hôpitaux ? Les sciences de l’homme s’imposent à l’individu . Elles sont devenue le « discours du pouvoir ». Il n’y a qu’à voir les ministres invoquant leurs experts techniciens en droit, économie, santé…pour en avoir la preuve sous les yeux. Elles sont devenues des stratégies du pouvoir. Le discours de l’homme, de ses droits surtout (qu’on pense à l’impact très grand que peut avoir pour tout un chacun la déclaration des droits de l’homme) ont servi, en quelque sorte, d’écran pour faire passer la pilule. Foucault approfondit ainsi sa critique de l’humanisme, qui à tout vent sort les arguments du droit, de la souffrance. Mais quel droit (le droit à toutes les sauces : droit de vote, droit des femmes, droit des homosexuels, droit à la différence) ?, quelle souffrance ? Tout est normalisé. Ainsi, de nos jours, les « corps » deviennent l’élément sur lequel s’appliquent les forces du pouvoir, tandis qu’elles impriment à l’esprit le discours de l’homme. Le pouvoir est comme une ruche où chaque abeille est au service de la Reine, sans que celle-ci finalement y soit pour quelque chose : tous, des « automates spirituels » ! En conséquence, l’opposition au pouvoir sera aussi « locale », en situation : elle ne peut être contre l’Etat de toute façon, car elle doit s’exercer au niveau même de la société. Foucault cherche dès lors dans ses Cours au Collège de France, notamment dans « Il faut défendre la société », des moyens de contrer ce Discours envahissant et ce Pouvoir qui lui colle à la peau. Des contre-discours peuvent exister, tentant d’ébrécher un peu ces monuments glorieux du pouvoir qui chantent les victoires des rois, des vainqueurs. Mais, le pouvoir essaie aussi de les récupérer au risque qu’ils deviennent des discours actifs de ce même pouvoir. Si bien que Foucault a l’impression qu’il faut changer de stratégie combative. Reculer pour mieux avancer. Si chaque fois que je lutte contre un pouvoir, je ne rencontre que la face hideuse du pouvoir, il faut que je puisse détourner le regard de la méduse. Foucault va donc ménager sa conception du pouvoir, sans pour autant la supprimer.

Le philosophe et le pouvoir pastoral

Le pouvoir n’est plus seulement ce qui normalise la société à la façon de rapports de forces qui l’articulent à tel ou tel discours, comme pour le pouvoir moderne, le discours des sciences de l’homme. Le pouvoir est maintenant conçu comme « un guide », c’est lui qui « conduit » l’individu à ce discours psychologisant. Il est un processus qui façonne l’individu lui-même. Le pastorat apparaît au 19ème siècle lorsque l’Etat se demande comment gérer le flux de natalité, des migrations. Le pouvoir se mue alors en pastorat : il devient un guide, qui se dote d’une police, de mutuelles d’assurances, d’hôpitaux. Son but est de «conduire» une population selon ses intérêts. Assurances, hôpital, police : tout est fait pour le salut de l’individu. L’Etat-providence, la sécurité sociale sont des inventions de ce « bio-pouvoir ». Le pouvoir pastoral guide la vie des individus : c’est pourquoi c’est un « bio » - (vie en grec) pouvoir. Alors qu’auparavant, à l’époque de la monarchie, c’était le droit de vie et de mort qui prévalait, aujourd’hui, l’Etat veut protéger ses citoyens. On dira que c’est bien, tel n’est pas l’avis de Foucault. Là où on voit un progrès dans « l’expérience de l’hôpital », voire dans la « sécurité sociale », Foucault ne voit que la ruse du pouvoir. Une façon pour le pouvoir de mieux cerner l’individu dans sa vie. Bref de le « surveiller », de le « contrôler ». Plus nous nous abandonnons au pouvoir, plus nous nous laissons prendre en charge (cela va du RMI au sacrifice obligatoire des « appelés » à la guerre), moins nous sommes libres, c’est-à-dire résistant au modelage de nous-mêmes. Le pouvoir est un « œil » qui cherche à regarder en nous et nous oblige à voir ce que lui veut que nous voyons : sa survie, sa perpétuation. Le pouvoir ne cherche pas à ce que nous voyons notre asservissement. Plus l’individu se pose la question de son identité, et plus il se soumet au pouvoir. Ainsi, ce qui d’abord (à l’époque de la Bible) ne s’appliquait qu’aux âmes pour leur salut, en vue de glorifier Dieu, s’applique aujourd’hui au niveau des corps pour leur santé, en vue de glorifier le pouvoir lui-même. Préserver l’individu - et la « population » - c’est pour le pouvoir moderne, une façon de se protéger lui-même. En agissant pour l’individu, le pouvoir agit pour lui. A la limite, à toute époque, c’est le pouvoir qui cherchait à se conserver : tantôt en arborant le discours de la religion, tantôt d’autres discours comme celui de l’homme.

Le pouvoir est donc un pasteur et nous sommes des moutons. Foucault serait-il alors, en critiquant le pouvoir, une brebis galeuse ?


BIBLIOGRAPHIE : Pour en savoir plus

- Surveiller et Punir, Gallimard, coll. Tel, 1993, ISBN : ISBN : 2070729680

- Histoire de la sexualité tome 1 : La volonté de savoir, Gallimard, coll. Tel, 1994, ISBN : 2070740706

- Il faut défendre la société, Seuil, coll. Hautes Etudes, 1997, ISBN : 2020231697

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Les passagers, un film de Jean Claude Guiguet (1998)

Publié le par Jean-Yves Alt

Le fil conducteur des « Passagers » : un tramway. Durant les brefs trajets des voyageurs, les destins se croisent mais ne se rencontrent pas forcément. Et nous suivons tantôt l'un tantôt l'autre hors du tram pour explorer quelques instants volés de sa vie privée.

Un trajet en tramway put être une quête d’espoir en l’humanité. La sincérité, l'émotion sont souvent au rendez-vous dans ce film, l'interprétation est volontaire, l'image marie les vues des lignes de la banlieue parisienne nord et de Strasbourg en créant un espace imaginaire, et plus finement, Jean-Claude Guiguet explore adroitement les comportements sexuels.

À mesure que le film avance, on devine le point commun entre tous les personnages. Ils mènent tous un combat silencieux pour préserver leur individualité face au monde moderne, pour réaliser leurs désirs malgré les turpitudes de la vie active, les conventions ou le quotidien d'une vie exsangue.

Construire une vie de couple, connaître enfin une passion amoureuse, vivre une sexualité différente sans se soucier des étiquettes ou des rôles prédéfinis. Ces étiquettes sont d'ailleurs dénoncées dans un excellent monologue de l'un des passagers - JeanChristophe Bouvet - sur la sexualité, magnifiquement interprété. L'un des moments de grâce du film.

Mais tous doivent aussi composer avec une société cynique et pouvoir y survivre. Nous ne voyons pas les personnages évoluer dans leur milieu professionnel (sauf la narratrice, Véronique Silver, admirable de vérité dans cette scène ou elle discute avec une collègue infirmière) mais l'on devine à travers les dialogues la place que prennent ces préoccupations matérielles qui sont autant de freins à leur vie.

Dans ce film, notre condition de citoyen soumis qui se débat pour exister un peu est dénoncée sans détour. Le tramway est à l'image de cette vie. Silencieux et design, il glisse dans la ville au milieu des tours. Dans ce temple de la sécurité et de l'ennui, la voix de la narratrice réchauffe le cœur. Assise au milieu des passagers, sereine, tel un sage, elle s'adresse à nous, elle nous prend à témoin. Elle a un rôle différent du narrateur habituel. Son intervention est davantage une réflexion sur les personnages ou sur le monde qui les entoure qu'une simple description de faits. Et c'est la force du film : cette volonté de dire les choses de manière frontale, de transcender l'anecdotique pour parvenir au cas général.

Le couple Rideau-Putzulu est une partie intégrée dans un tout. L'homosexualité est banalisée. Beaucoup de pudeur dans ce film avec des moments d'intimité qui nous révèlent de vrais personnages, complexes, construits.

"Les passagers" n’est pas un film naturaliste mais très stylisé. Le monde est entièrement réinventé. Ce n’est pas une photocopie du réel mais une transposition de la réalité, très consciente.

Le côté funèbre apparaît lorsque les personnages commencent à dire que les maîtres du monde sont l’exigence du « toujours plus » et c’est la fin de l’homme. Ou c’est la matière qui l’emporte et l’homme n’est plus qu’une marchandise. Si la docilité de l’homme face aux pouvoirs aboutit à ce qu’il soit détruit pour une réalité matérielle, alors, oui, on peut poser la question : où est-il ? Cette interrogation culmine avec cet échange :

« - C’est la folie authentique et sa rationalité qui différencient le génocide juif de tous les autres...

Il est né du rendement et de l’efficacité...

- Le mécanisme de son horreur est aussi celui qui fonde l’ensemble des sociétés industrialisées. Il est l’abîme que contient en silence l’idée béate du progrès. »

Pour casser le côté solennel, deux petits garçons interviennent alors :

« -Il y a pire que le bourreau...

- C’est son valet. »

À noter, une très belle mise en musique des images, en ayant recours à Tchaikovsky (Casse-Noisette), Berlioz (la Fantastique), Beethoven (3ème mouvement de la IXème), F. Couperin (les divines Leçons de Ténèbres) et Ferré (Spleen).

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Socrate : « Connais-toi, toi-même »

Publié le par Jean-Yves Alt

On assimile souvent Socrate à cette célèbre formule de Delphes qu’il a faite sienne.

Mais cette seule formule contient aussi une autre signification : se connaître soi-même signifie aussi savoir discerner ce qui est bien de ce qui est mal, et c’est en cela que Socrate s’oppose aux sophistes à qui on le compare souvent, puisque sa recherche a pour but exclusif le domaine moral.

Socrate passait le plus clair de son temps à discuter avec les gens à Athènes, dans la rue ou sur la place du marché. Son enseignement reposait tout entier sur l'idée que les concepts sur la nature humaine en général et l’être humain en particulier pouvaient être compris de façon purement objective : Socrate était donc à la recherche de la définition des grandes notions morales comme la justice, la piété, le bien , le courage, la tyrannie, la tempérance, l’amitié… Nous sommes tous en mesure de donner des exemples de cas d'actes ou de gestes justes et injustes, courageux, amicaux ou amoureux.

Mais ce ne sont pas des exemples illustrant ces actes, qui intéressaient Socrate. Il était à la recherche de définitions quant à la nature propre de chacune des vertus. Cette recherche de définition des concepts est au cœur même de sa façon de faire de la philosophie.

Il pensait que tout vice provient de l'ignorance et que nul n'est délibérément mauvais. En conséquence, la vertu était la connaissance , et de la connaissance du bien découlait la bonne conduite. D’où son travail d’argumentation rationnelle et la recherche de définitions générales, comme l'attestent les dialogues (lire le «Ménon») de son jeune contemporain et élève, Platon.

À la lecture de l'un ou l'autre de ces «dialogues socratiques», on en sort pour ainsi dire «plus intelligent» ou plus réflexif , qu'avant, plus «critique». Même s'ils paraissent ne pas aboutir, ces dialogues demeurent des modèles de réflexion critique. C'est d'ailleurs ce qui explique qu'on lit les textes de Platon depuis plus de deux mille ans. Ce sont des chefs-d’œuvre d'écriture littéraire et philosophique.

Pour Socrate, la vérité n'était pas empirique mais entièrement «réflexive», une exigence de conformité de la pensée avec elle-même et l'existence. C'est ce qui explique d'ailleurs qu'il prétendait n'avoir rien à enseigner aux autres, mais seulement à tenter de leur faire entrevoir, par la parole dialectique, à quel point ils croyaient savoir ce que, en réalité, ils ignoraient. Si la vérité ne se trouve que dans le langage, elle renvoie forcément à une idéalité, laquelle ne peut être qu'une et absolue : c'est la logique, ainsi, qui fonde l'aventure spéculative de Socrate, l'existence de l'âme et son immortalité.

Socrate était un pessimiste qui savait que le désir est, par définition, toujours malheureux et du fait de son ambivalence, ne peut échapper à la déception.

Il savait aussi que le principe majoritaire ne menait pas inéluctablement, et loin de là même, à la vérité, ce qui fait qu'un philosophe ne pouvait décemment pas, à ses yeux, participer au monde, et surtout politique.

Puisque la vie est un non-sens et que nous ne savons pas ce que nous réserve la mort, faisons l'hypothèse de la vérité. Que cette dernière s'avère - et qui pourrait nous en assurer ? - vraie ou fausse, la vérité est la seule à pouvoir nous aider à accepter, malgré tout, l'existence. Socrate relèverait ainsi, d'une «logique de l'espérance».

À Lire : Bref traité du désenchantement, Pierre Grimaldi, réédité en Livre de poche Biblio Essais, 2004, ISBN : 2253130702

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Parlons Travail, Milan Kundera : entretien avec Philip Roth

Publié le par Jean-Yves Alt

QUESTIONNER : « Je me méfie des mots pessimisme et optimisme. Le roman n'affirme rien, il cherche, il pose des questions. Je ne sais pas si mon pays va périr et je ne sais pas non plus lequel de mes personnages a raison. Moi, j'invente les histoires, je les confronte, et c'est ma manière de poser des questions. La bêtise des hommes vient de ce qu'ils ont réponse à tout. (pp. 119-120)

La sagesse du roman, c'est d'avoir question à tout. Quand don Quichotte est sorti affronter le monde, ce monde lui a paru un mystère. Tel est le legs du premier roman européen à toute l'histoire qui le suivra. Le romancier apprend au lecteur à appréhender le monde comme question. Il y a de la sagesse et de la tolérance dans cette attitude. Dans un monde construit sur des certitudes sacro-saintes, le roman est mort. Le monde totalitaire, qu'il ait pour base Marx ou l'islam, ou n'importe quoi d'autre, est un monde de réponse plutôt que de questions. Le roman n'y a pas sa place. En tout cas, il me semble qu'à travers le monde les gens préfèrent aujourd'hui juger plutôt que comprendre, répondre plutôt que demander, si bien que la voix du roman peine à se faire entendre dans le fracas imbécile des certitudes humaines. »

Parlons Travail, Milan Kundera : entretien avec Philip Roth, Editions Gallimard, collection Du Monde entier, 2004, ISBN : 2070764672

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L'étranger par Michel Vicario

Publié le par Jean-Yves Alt

Michel Vicario est un peintre de l'homme quotidien, même qu'il projette sa vision, son sujet, dans une dimension comme intemporelle.

Qui sont ces hommes, pensifs ou accablés, interrogatifs en tout cas, que son pinceau ou son crayon surprend en attente, ou penchés sur leur abîme intérieur ?

Ils font songer à « L'Étranger » de Camus.

Si les compositions de Vicario sont énigmatiques, c'est parce qu'il ne néglige aucun détail : le corps, l'écriture, le vêtement, l'accessoire, le quadrillage, tous ces éléments sont essentiels dans ses toiles. Le contexte, le contenu de ses toiles sont fonction du tout qu'il veut exprimer.

De plus, les supports particuliers des peintures (carton ondulé, etc.) correspondent parfaitement à leur pouvoir de suggestion et d'originalité.

L'étranger par Michel Vicario

Michel Vicario – Sur le dos

On saisit en regardant ses toiles que le peintre soumet sa pensée à un enfermement qu'il traduit en harmonies de gris, de blancs éteints, de vert olive, d'ocre, de bistré. Jamais un cri claironnant de couleur, qui signifierait l'appel du sujet vers une vraie joie, un écartement du cachot. Comme si l'homme était bloqué par le décor.

Site du peintre

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