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Eloge de l'âge, Christian Combaz

Publié le par Jean-Yves Alt

J'ai aimé ce livre de Christian Combaz que je viens de relire. Loin d'être rétrograde, il redonne à la dimension essentielle de l'homme, le temps et la mort, ses lettres de noblesse.

« Maigrir, rester jeune ! » Hier, un slogan publicitaire, aujourd'hui une manière de vivre qui s'érige en modèle. La vieillesse comme le sida est devenue une maladie honteuse, transmissible de proche en proche et dont il faut absolument préserver nos chères têtes blanches.

L'Ancien Monde est devenu vieux, cela explique peut-être la multiplication des livres qui ont pour objet le traitement médical ou social de l'âge, tous prônent peu ou prou la prévention de la vieillesse. Dans nos sociétés industrielles, les vieux commettent un double outrage à l'égard de l'économie, d'abord ils cessent d'être des citoyens actifs ce qu'on leur pardonnerait volontiers s'ils ne se livraient pas à pire : cesser d'être des consommateurs. Les vieux avaient pris cette fâcheuse habitude de vivre de peu et de s'écarter du monde sur la pointe des pieds, la situation devenait intolérable, fort heureusement des campagnes d'information bien menées persuadèrent un nombre croissant d'entre eux que leur vie n'était pas finie et qu'ils pouvaient encore en profiter jusqu'à leur dernier souffle. Les séries TV regorgent de beaux vieillards dynamiques et bronzés qui pratiquent pour rester dans "le coup" un régime sévère et un jogging régulier. S'interdire de sombrer trop tôt dans la décrépitude, soit, mais c'est une aberration de croire que rester dans le jeu en compagnie des jeunes serait un remède infaillible pour écarter la mort.

L'Eloge de l'âge, le livre de Christian Combaz est la voix de la dissidence, il s'oppose à l'opinion commune et prétend défendre le droit imprescriptible de l'homme à la vieillesse, il affirme enfin qu'il est moins important d'être en forme que d'être en paix. Pour l'auteur, il faut espérer sa vieillesse comme le point culminant de la vie et non chercher désespérément à en prévenir l'apparition comme s'il s'agissait d'une chute. En essayant de faire croire aux vieillards qu'ils sont encore jeunes, non seulement la société les dupe, mais les prive du droit de tirer des leçons, de chercher un sens à leur vieillesse et à leur mort. Si nous préférons nos vieux insouciants et superficiels, c'est que leur regard dérange car il s'y reflète la profondeur du néant. Refuser la vieillesse revient à avouer une peur pathétique de la mort, mais détourner les yeux ne retarde pas l'issue fatale. L'homme âgé doit vivre avec sa mort, s'habituer à elle, la domestiquer, c'est encore le meilleur moyen de ne plus la redouter.

La seule attitude digne face à l'échéance est celle qu'on adopte dans une salle d'attente quand on n'a pas le cœur à lire une revue. Elle consiste à regarder devant soi calmement. C'est à quoi ce livre invite.

■ Éloge de l'âge, Christian Combaz, Éditions Fayard, 2001, ISBN : 221360827X


Du même auteur : Constance D. - A ceux qu'on n'a pas aimés

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