Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

A l'école, quand tout était justifié, même la mort par Roger Peyrefitte

Publié le par Jean-Yves Alt

Dans Les amitiés particulières, roman autobiographique de Roger Peyrefitte (1944), le père Lauzon, représente la figure terrifiante du supérieur du collège, pédagogue parfait jusqu'au crime :

Ce désir de mort de l'enfant, il est, partout présent, et d'autant plus que tout concourt à sa protection. Il n'est pas besoin de passer au plan du symbolique pour comprendre que l'enfant meurt dès qu'il entre dans le projet du maître pour lequel il représente l'inconnu, le toujours nouveau, l'intolérable. Ce qui est sûr est que, dans cette destruction d'une part irremplaçable de l'individu, la sexualité entre comme facteur primordial.

C'est pointer le désir de mort là où l'amant fait place à l'éducateur. Là encore, l'enfant qu'est censé être Georges, le survivant, voit juste :

« Le vrai coupable, c'était ce prêtre qui avait été l'instrument de la mort. C'est lui qui, au nom du bien, avait fait tant de mal. » (p.432)

L'aveu du prêtre, inaugurateur d'une réconciliation entre adultes du même monde, respectueux du même ordre social et moral, donne à cette intuition son point d'orgue :

« Autant que vous souffriez, vous ne souffrez pas autant que moi. Cet enfant, je l'aimais plus que vous. » (p.434)

L'homme parle à cet instant puis se replie dans le rôle sacrificiel du prêtre :

« La mort de votre ami, si condamnable soit-elle [Alexandre s'est suicidé] , l'a soustrait au pire des péchés. [...] J'ai été implacable parce que je défendais sa pureté, qui était à un âge critique. Le démon du matin est plus redoutable que le démon de midi. C'est lui qui est l'auteur de ce drame, mais c'est Dieu qui a triomphé. » (pp.435-436)

Et remettant à Georges une photo de l'enfant :

« Vous vous souviendrez aussi que c'est en s'éveillant à la vie des passions qu'il mourut. » (p.437)

Ainsi tout est justifié, puisque la leçon, quoique rude, fut profitable !


Roger Peyrefitte, Les amitiés particulières, Jean Vigneau éditeur, 1944

La pagination indiquée est celle de l'édition de 1973, Le Livre de Poche, 443 pages

Commenter cet article