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Berlin-Harlem, un film de Lothar Lambert (1974)

Publié le par Jean-Yves Alt

John, G.I. noir, stationné à Berlin, quitte l'armée américaine. Il décide malgré tout de vivre à Berlin, mais son insertion sociale s'avère difficile. Son amie allemande veut, grâce à l'enfant noir qu'elle a eu, le faire "correspondre" à sa vie petite bourgeoise.

La révolte de John, face à cette situation, l'entraîne à rechercher autre chose mais il se trouve étouffé entre deux mondes : le racisme viscéral de la société allemande et l'attrait frénétique de la sexualité exotique. Il est réduit à un objet manipulable à volonté, soumis à l'emprise et aux désirs de ses partenaires aussi bien homosexuels qu'hétérosexuels. Toute ses expériences s'enchaînent de manière dramatique et inéluctable jusqu'au moment où il est obligé de quitter précipitamment Berlin pour retourner dans son pays qu'il avait toujours pensé être le plus raciste du monde. (Résumé tiré du programme du Festival Question de Genre - Lille -1995)

Lambert se penche sur le thème de l'absence d'amour dans une société pourrie jusqu'au trognon avec des individus "malades" que sécrète une société "malade" comme si l'amour avait toujours été le seul médicament. Le problème, c'est que l'amour, il n'y en a plus... ou alors il n'est pas à Berlin, et les personnages entretiennent l'illusion qu'ils pourront le trouver auprès d'une pureté qui existerait encore chez les immigrés. Mais ils sont à peine capables d'utiliser chez ces immigrés la seule chose qui les intéresse un peu : leur sexe. Les étrangers deviennent ainsi des objets sexuels et sont forcés de s'en accommoder dans une société où ils sont en état d'infériorité.

Incapacité d'aimer, impuissance à assumer la vie : ce n'est pas le mal, mais le malheur de vivre et la preuve que le seul désir en soi ne peut constituer une motivation suffisante.

Ces gens sont des légumes, racistes et frustrés, et j'ai du mal à avoir de la compassion pour leur misère. Je me dis que pour eux, partout et avec tout le monde, ce sera l'enfer. Ils ne semblent pas se rendre compte qu'ils sont les premiers responsables de leur souffrance et s'autodétruisent dans le cancer de leur insatisfaction. Un des rares désirs qui les excitent encore est l'humiliation : tout un programme. (cliquer sur la photo)

Ce film souffre d'un manque évident de moyens. Il souffre aussi d'un rythme répétitif, des redites qui n'apportent rien de nouveau : pourquoi dire mal en une heure et demie ce qui aurait été beaucoup plus fort en vingt minutes ?

La recherche désespérée de bites noires par les homosexuels de Berlin-Harlem ne m'a ému pas un seul instant. Jamais je n'ai éprouvé pour tous ces personnages autre chose que de l'indifférence : mon cœur n'a pas été visé et tout s'est arrêté pour moi à la rétine.

Le regard de Lambert (bien qu'il s'agisse d'un film de fiction) est plus celui d'un observateur, d'un témoin, que celui d'un créateur : Berlin-Harlem est de l'ordre du documentaire sociologique, voire ethnologique : voici quelques spécimens humains observables à Berlin-Ouest dans les années 70 (j'imagine que cette observation ne devait pas être l'apanage de Berlin), et c'est à ce titre que ce film mérite ma considération.

Lothar Lambert met cependant le doigt sur des questions importantes, fondamentales même. A chacun d'en tirer ses conclusions...

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