Le cercle du pouvoir, un film de Bobby Roth (1981)
Le cercle du pouvoir de Bobby Roth fait référence à certaines pratiques qui eurent cours aux Etats-Unis dans les années 60.
Les employés d'une grosse firme internationale désirant devenir cadres étaient obligés de suivre (en payant) un séminaire de plusieurs jours dans un institut où l'on s'efforçait de leur inculquer les secrets de la réussite, le goût du commandement : pour cela les animateurs de l'institut avaient les mains libres et s'employaient par tous les moyens à « décrasser » l'esprit des postulants, à débarrasser ceux-ci des inhibitions qui entravent l'efficacité du chef.
Parallèlement, leurs épouses étaient regroupées afin de devenir d'authentiques « femmes de chef ». Précaution de l'institut : il faisait signer aux candidats un document autorisant les animateurs à agir en toute impunité.
Evidemment, on imagine que la violence et l'humiliation allaient devenir les règles du jeu...
Le film de Bobby Roth nous montre donc plusieurs couples réunis dans une semblable expédition pour le succès professionnel et social : les femmes sous la baguette du bellâtre Jordon (John Considine) et les hommes sous le charme féroce de la belle Bianca (Yvette Mimieux qui entretient un trouble glacé) assistée de deux malabars. Tout se passe dans la superbe maison de Bianca où est étalé tout le mauvais goût américain pour le clinquant et l'apparence.
L'ambiguïté du film résidera d'ailleurs dans l'apparence : dans quelle mesure les candidats sont-ils sincères, dans quelle mesure jouent-ils le jeu, dans quelle mesure sont-ils conditionnés par le lavage de cerveau qu'on leur impose ?
S'agissant de façonner des chefs, de fabriquer des gens qui s'assument totalement, les animateurs s'emploient à créer dans le groupe des contraintes mutuelles, des pressions entre les candidats : que l'on refuse d'avancer, de parler, de se mettre à poil au physique comme au mental, les autres l'assaillent, participent à son humiliation afin de l'aider à « progresser », car le retard d'un seul rejaillit sur tout le groupe (sanctions physiques et arrêt collectif de la progression) comme le succès de l'un entraîne un pas en avant pour tous.
Exemple de blocage résolu grâce à la méthode-choc de Bianca ?
Celui du gros Buddy. Pourquoi est-il obèse et tellement inhibé ? Parce que, adolescent, il surprit sa mère dans un rapport homosexuel et que lui-même fut sodomisé par son instituteur. Il en avait éprouvé du plaisir, mais l'image de sa mère ayant établi un tabou sur l'homosexualité, il devint obèse pour ne plus jamais être désiré par un homme...
Le plus dramatique est que les applications de cette idéologie douteuse semblent donner des résultats et au bout du compte on se demande si cette thérapie n'aurait pas simplement mis en lumière que l'humanité court le risque permanent du fascisme.
Dans le groupe que présente le film, un seul individu (celui qui se révolte vraiment et s'impose à tous les autres) devient un meneur d'hommes, tandis que les autres ont vu pousser la graine de bon militant fasciste qui attendait l'occasion de se révéler. Là réside l'intérêt d'un film.