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Un printemps de glace (An Early Frost), un film de John Erman (1985)

Publié le par Jean-Yves Alt

Katherine et Nick Pierson ont tout pour être heureux, surtout grâce à leur fils, Michael, brillant avocat.

Tout est calme et paisible dans cette petite maison de Boston. Pour célébrer le trentième anniversaire de leur mariage, Papa et Maman ont réuni leur progéniture. A Chicago, Michael, leur fils aîné s'apprête à les rejoindre. Mais depuis quelque temps, il a du mal à se lever, il est constamment fatigué. Après des examens compliqués, il reçoit en pleine figure le diagnostic fatidique. Il a le sida. Et personne pour le soutenir alors qu'il se rend dans la maison familiale. Son petit ami lui reproche d'être allé baiser ailleurs, alors qu'ils vivent ensemble depuis deux ans.

Et ses parents qui ne se doutaient même pas de son homosexualité ! Sa sœur le fuit parce qu'elle est enceinte et sa mère est toujours au bord de l'affolement. Il faudra attendre l'arrivée de la grand-mère (Sylvia Sidney) pour recoller les morceaux d'une famille désemparée. Elle sera la première à oser « donner le baiser au lépreux » et à dire « c'est une maladie, pas une malédiction ». Finalement le père lui-même mettra de l'eau dans son vin : il faudra que des ambulanciers refusent de prendre en charge son fils pour qu'il choisisse de le défendre face à ce comportement discriminant ; il invitera même le petit ami à venir partager leur toit.

Ce film fait bien comprendre qu'au milieu des années 80, les familles apprenaient très souvent – en même temps – l'homosexualité de leurs enfants et la maladie. Ce qui était vécu comme une double peine. Le médecin ne cache d'ailleurs pas à la mère de Michael qu'il n'a « jamais vu un malade du sida en réchapper ».

Avec le personnage de Victor (John Glover) que Michael rencontre à l'hôpital, il y a dans ce film une touche très théâtrale (les anglais utilisent le terme « outrageous ». Victor est un pédé efféminé, avec un humour terrible alors qu'il se déplace avec un déambulateur et qu'il est couvert de marques de Kaposi. Mais parce qu'il reste totalement humain (il est généreux, fin, drôle, solidaire et courageux), il gagne l'affection de la famille de Michael et du public. Ce personnage est une grande réussite du réalisateur John Erman car il réussit à dissoudre les clichés qui lient sida et "follitude".

Un printemps de glace est un film d'une grande pudeur. Evitant le registre mélo, les acteurs donnent le meilleur d'eux-mêmes. Gena Rowlands dans le rôle de Katherine reste digne en mère de famille. Quant à Aidan Quinn (dans le rôle de Michael), loin de la caricature homosexuelle, il sait rester grave. Un film où l'émotion joue un rôle capital… et qui peut toucher le grand public.


Ce film fut diffusé à la télévision française (Antenne 2) en mai 1986 dans le cadre de l'émission « Les Dossiers de l'écran » qui avait pour thématique : Le Sida ou La Peste du XXe siècle.

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