Obsessions : Enquête sur les délires amoureux, par Jean-Luc Hennig
Dans cet ouvrage, Jean-Luc Hennig traque tous ceux qui vivent pour une idée fixe. Obsessions, pas toujours sexuelles, qui concentrent toutes les activités de l'individu. Une manière de vibrer éternellement au cœur d'un cérémonial à soi-même dédié.
Jean-Luc Hennig – qui laisse pressentir sa propre philosophie, son respect total de l'autre dans sa différence – réunit là quelques histoires d'êtres marginaux. « Obsessions » révèle un autre univers, cohérent et sublime où l'homme se met en scène dans la poursuite d'un absolu dont il se donne l'exacte représentation. Là est le centre fascinant de cet ouvrage. Le sentiment que chaque femme, chaque homme interrogé atteint l'adéquation parfaite, une forme d'amour total.
Il y a la femme qui sans cesse se suicide, le garçon qui est la doublure de Jeffrey Lee Pierce, se croit l'autre, devient cet autre. Alain qui ne désire que les cheveux des hommes, qui vit pour les cheveux, qui collectionne tous les textes où la moindre phrase concernant la toison fait les délices d'un découpage. Cet autre encore qui ne peut jouir qu'entouré de flammes, qui va s'isoler la huit dans des lieux perdus, s'entoure de bougies, de cierges, d'allumettes accrochées à son corps, s'embrase dans des acrobaties incroyables pour ce martyre du bûcher qui lui donne l'extrême volupté.
Si certains d'entre eux trouvent les moyens et la fin dans leur seule personne, d'autres sont en quête d'un partenaire sur mesures, qui comprendrait les rites de leur plaisir, s'y inféoderait dans la soumission la plus totale et, suprême luxe, trouverait son propre plaisir dans ce rôle de servant. Il y a chez certains cette nostalgie du frère particulier, un jumeau qui saurait tout d'avance.
Comment l'être humain arrive à se créer Dieu dans un enfer de délices, dont il voit toute la dramatique exception, ne se lasse pas d'en démêler l'ordonnance et d'en juger les périls ? Seul compte l'espace entre la perfection de l'état à atteindre et les contraintes qu'impose la société.
Dans notre société du mimétisme et de la banalité ces « fous » ont la stature des saints. Ils clament une absence, un amour absolu, ils donnent à la solitude sa vertigineuse splendeur.
« Ce sont les artistes de leur obsession. Ils enferment l'autre dans des litanies, des prescriptions, des lexiques, des journaux intimes, pour mieux le circonvenir, le posséder, et en retire infiniment toute l'absence, les déchirements et les peurs. »
■ Obsessions : Enquête sur les délires amoureux, par Jean-Luc Hennig, éditions Albin Michel, 1985, ISBN : 2226022325
SOMMAIRE : Présentation : L'amour parfait. Chapitre 1 : Le délire célibataire (L'encyclopédiste, le carnet à Georgina). Chapitre 2 : Photographies de l'amour (le bas nylon, la femme embarrassée, la jacinthe et les hommes écureuils). Chapitre 3 : Le ravissement (l'homme chien, la doublure, jalousie, les guerriers, gueule d'enfer). Chapitre 4 : L'exercice de Dieu (chasteté, l'icône). Chapitre 5 : Vertiges (histoire de la femme qui se tue, l'orange, l'homme illuminé, l'incendiaire, le boucher). Chapitre 6 : L'amour muet (la loutre, tatouage, l'homme étendu, trahisons, le camion).
Du même auteur : Mon beau légionnaire - Brève histoire des fesses