Découvrir sa vérité, ce n'est ni la deviner, ni l'effleurer, Marcel Jouhandeau
Ni en humer le parfum, ni en apercevoir le reflet, en admettant qu'elle soit insaisissable elle-même, ni non plus la comprendre au point de pouvoir l'expliquer :
c'est malgré soi, sans savoir pourquoi ni comment cela s'est fait, en être possédé de la tête aux pieds, de l'ongle des orteils et des doigts à la pointe des cheveux, de tous ses sens jusqu'au tréfonds de l'âme, ne respirer qu'elle, ne voir qu'elle, n'entendre et ne toucher qu'elle à travers toutes choses, n'obéir qu'à elle, ne s'adresser qu'à elle, ne désirer et ne craindre qu'elle, n'être qu'un avec elle et qu'elle ne fasse qu'un avec vous et avec le reste du monde dont elle est devenue le signe pour vous seul.
Et peu importe que cette vérité soit d'un ordre élevé ou d'un ordre bas et qu'elle soit « la Vérité » absolument, pourvu qu'elle soit la vôtre ou la mienne uniquement et qu'entièrement elle m'habite. Et peu importe que je me l'explique, pourvu qu'elle m'explique moi-même et le reste. [page 26]
Marcel Jouhandeau
■ in De l'abjection, Editions Gallimard, 2006, ISBN : 207077743X
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