La catastrophe ultraviolette, Marie-Florence Ehret
Dire la drogue, dire en même temps le déracinement des Algériens grandis en France, et le dire sans complaisance, sans évangélisme, sans antiracisme candide, ne s'accomptit pas facilement.
La catastrophe ultraviolette, c'est d'abord le roman de Zohra et de son fils Adonis. Une vie de femme algérienne, consciente mais soumise aux rites d'une tradition. Roman d'une femme aimée dans une civilisation où cet amour ne se dit pas. Récit d'un adolescent et de son compagnon, Hermès (le voleur d'illusions), histoire fatale de la drogue qui devient maîtresse du jeu.
Légende sans issue d'un amour unique et multiple : Rose et Adonis... et Hermès. Rose et le désespoir blanc. Les couleurs du rêve plus lumineux que la vie, que se disputent la Mort et la Vie, personnages narrateurs aux prises avec une société qui clame le bonheur et n'en donne pas les clés.
Celle qui parle est sans doute vie et mort, mais aussi une femme, une femme qui est Rose et Zohra, une femme qui ferme les rideaux sur le gris du quotidien pour étendre les couleurs de l'arc-en-ciel.
De l'incandescence blanche de la drogue au noir de la nuit privée de la caresse de l'autre, il y a le rouge de la passion, le bleu des souvenirs quand ils chantent le ciel, le violet du temps qui promet mais ne donne pas.
Il y a une femme qui écrit la seule chose que l'on peut écrire : la rencontre sublime et impossible d'un amour qui n'aurait plus de couleurs parce qu'il prendrait celles du temps qui fuit.
Mêlant des textes « lus » - remarquables mélopées imitées des poètes musulmans - des dialogues précis qui dénudent la réalité sociale et la musique d'une quête inassouvie de la joie, le roman de Marie-Florence Ehret sort des carcans et s'épanouit dans la liberté de l'écriture.
■ Editions La Différence, 1989, ISBN : 2729104178