Apparence féminine, un film de Richard Rein (1980)
Jean-Paul ne s'est jamais reconnu dans le sexe masculin, il n'est devenu lui-même qu'en se donnant l'identité d'une femme : Dominique... Elle s'explique sur cette transformation.
Cinéma-vérité sans artifice de mise en scène. Caméra fixe. Le document à l'état brut tourné à l'économie. Malaise du voyeurisme. Face à soi, Dominique, la trentaine, parle. Jean-Paul sommeille encore en elle...
Le passage de il à elle
Témoignage passionnant que celui proposé par « Apparence féminine ». Balayé le discours classique du travelo en représentation. Battue en brèche l'image de l'hyperféminité tapageuse. Aucune illusion. On a affaire à un travesti qui travaille, qui a un amant et, ô surprise, qui se raconte avec lucidité.
« Je refuse mon homosexualité... je veux mettre entre moi et l'homme qui m'attire une distance maximum pour oublier que je suis peut être comme lui. »
A aucun moment n'est affirmé l'adage selon lequel le travesti est une âme féminine dans un corps masculin, une erreur de la nature. Aucune revendication de ce genre. L'histoire pratiquement logique d'un garçon efféminé, d'un adolescent qui connaît quelques aventures masculines qui lui laissent un goût amer, d'un jeune homme torturé par ses affinités et qui trouve un moyen terme à ses difficultés : lui, hésitant, mal à l'aise, se met à l'abri derrière elle, naissante. Ne pouvant modifier son désir il intervient sur son image qui, transformée, le met à l'abri : les hormones ratifiant la décision qui n'ira jamais jusqu'à la mutilation. Apparence féminine, seulement.
Récit linéaire, parfois trop, jusqu'au moment où se produit la cassure : rencontré des années après le changement, l'ex-moniteur scout, vient dire sa fascination pour Dominique, pour l'itinéraire qu'il/elle a suivi. Piégée par la caméra elle dit la magie de l'autre qui attire et dérange, de l'autre qui réveille en soi un carrousel de contradictions.
Les propos de Dominique méritent d'être ré-écoutés et ré-entendus (lire un extrait) car ils font partie de ces confessions qui dépoussièrent les idées reçues.
« Apparence féminine », c'est ce que mentionne sa carte d'identité.