La vie sur un fil, un film de Chen Kaige (1991)
La vie sur un fil est photographiquement beau comme un Géo-Spécial-Chine, même si ses interprètes ne peuvent hélas remédier à la maigreur du scénario : un très vieux sage aveugle et son disciple non-voyant traversent la Chine au radar, le premier grattant son banjo comme un dératé pour venir à bout de mille cordes (ce qui devrait lui rendre la vue), et le second commençant à « renifler » les femelles au grand désespoir de son possessif aîné.
L'intention humaniste est sans doute à la source de ce film chinois très singulier, où se retrouve la confrontation du grand âge et de la jeunesse, de la lumière et de l'obscurité, de la sagesse et de l'initiation.
C'est, sinon une parabole, du moins un conte, qui se passe dans une Chine d'avant le communisme, agraire, traditionnelle, emprunte de spiritualité. L'époque est difficile à identifier, mais l'action semble se passer au début de ce siècle.
Le film, lyrique, ample, montre la vie – quasi conjugale – de cet anachorète musicien et de son disciple adolescent, tous deux aveugles : pour guérir, le remède « banjo » consiste, selon la légende, à casser mille cordes de l'instrument.
Ce sera peine perdue, mais là encore, l'important est d'avoir la foi. Une bonne leçon donnée aujourd'hui à une Chine populaire sans croyances et aussi, en filigrane, de leur apprentissage de l'amour, de l'affranchissement progressif du giton aveugle.
Faut-il voir dans le banjo, entre le vieillard et le garçon, un symbole phallique de leur passion ? La corde cassant comme une débandaison…
Toute ironie mise à part, chaque scène, chaque dialogue suggère un décryptage sexuel. La vie sur un fil échappe certainement, pour une grande part, à une interprétation d'Occidental. C'est un film à voir, comme une histoire venue d'ailleurs.