Pasolini : une conscience publique par Philippe Gavi
« Pasolini est une des rares personnes à avoir su inventer une nouvelle manière de fonctionner de l'intellectuel engagé. L'engagement ne porte plus vraiment sur la cause ou le parti que l'on soutient, il est dans le mode d'intervention publique. Chaque article est un coup bien ajusté, minutieusement préparé, prenant de plein fouet la question d'actualité qui agite tout le monde et la retournant de telle sorte qu'elle provoque un vrai débat sur le fond, une discussion d'idées.
Et, cela, toujours avec une tendresse extraordinaire, un respect de la parole de l'autre, une écoute qui, n'étant généralement pas partagée ; ceux qui polémiquent avec lui cherchant presque toujours, pour convaincre, à déformer ce qu'il a dit, ou à alléguer ce qu'il n'a pas dit, oblige à cette petite révolution qu'est la réflexion. Là où il y a une subjectivité qui se nie et veut se donner comme principe établi, Pier Paolo Pasolini invoque les principes, il avance des arguments rigoureux. Là où il y rigueur et principes, il invoque la subjectivité et la dialectique. Il est l'homme qui dit TOUT ce qu'il pense, l'homme de la transparence, de l'athéisme politique. Grâce à quoi, il était devenu une sorte de conscience publique pour les Italiens, provoquant notamment chez les jeunes communistes avec qui il ne cessait de discuter de fertiles remous. »
Philippe Gavi
in préface des Écrits corsaires (Scripti corsari, 1973-1975), Pier Paolo Pasolini, Éditions Flammarion/Champs Contre-Champs, 1993, ISBN : 2080815059
Lire encore : Pier Paolo Pasolini, une biographie de Nico Naldini