L'atelier de Friedrich peint par Kersting
Un géant blond (il s'agit du peintre Caspar David Friedrich 1774-1840) est assis devant son chevalet ; il est concentré sur son travail et peint avec application un paysage.
L'atelier est entièrement vide. Deux palettes, un té de dessinateur et une équerre accrochés au mur sont les seuls ornements. Une boîte de peinture et trois flacons sur une table. Les volets clos isolent de l'extérieur.
Un carré de ciel diffuse une lumière pâle. La couleur des murs et du plafond donne à la pièce une lueur verdâtre. On sent peser le silence. On se croirait dans un laboratoire.
Le peintre a fait le vide autour de lui et en lui. Ce qu'il peint, ce n'est pas ce qui est devant ses yeux, mais ce qu'il voit dans son cœur, son paysage intérieur.
Si Friedrich est un amoureux de la nature, il ne confond pas sa contemplation et le travail de peintre : il reproduit ce qu'il voit dans sa tête.
Autant le lieu où travaille Friedrich est clos, étroit, secret, autant ses paysages sont démesurés, sans limites. C'est un monde grave, mélancolique, d'où toute futilité est exclue.
Georg Friedrich Kersting – L'atelier de Caspar David Friedrich – 1811
Huile sur toile, 54 x 42 cm, Kunsthalle, Hambourg
Dans ce tableau de Kersting, Friedrich est appliqué à une besogne aussi minutieuse qu'impénétrable. Que fixe-t-il ainsi, l'œil rivé sur le sujet, le pinceau pointé comme un bistouri sur un détail de son tableau ? Son regard semble transpercer la toile, comme s'il cherchait à découvrir un mystère. Sans doute se cherche-t-il lui-même, s'efforçant de décrypter le sens de ce paysage surgi sous ses doigts et conçu « avec les yeux de l'esprit ».