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La pédérastie de Gide vue par Ramon Fernandez

Publié le par Jean-Yves Alt

Corydon considéré par beaucoup comme une violence destinée à défendre la pédérastie de Gide est, pour Ramon Fernandez, la pierre angulaire de son œuvre.

Dans son essai sur Gide (1), Ramon Fernandez s'acharne à mettre en lumière, sans faux-fuyants, sans moralisme, la révolution intérieure que fut pour Gide la révélation du plaisir mais aussi sa volonté d'assumer sa pédérastie sans la clameur des agressivités gratuites, mais avec le courage (dans cette première moitié du XXe siècle) d'un être qui ne peut nier, ni renier, la part importante de la chair et ses conséquences dans un mode de vie et une œuvre littéraire.

Ramon Fernandez situe très bien le regard que portait Gide sur son goût des garçons :

« On n'entend rien, en effet, au problème de la pédérastie si l'on ne s'avise du fait qu'elle est un objet d'opprobre, non seulement pour les vertueux et les saints, mais pour les libertins et les débauchés [...] Aisément, l'inverti devient le bouc émissaire de la débauche universelle, une sorte d'abcès de fixation par où s'écoule le pus du corps social. »

Dans le chapitre sur Corydon, Ramon Fernandez décortique les rapports entre « naturel » et « chrétien » et bouscule bien sûr cette notion de « naturel » qui est subjective mais s'entête à se vouloir une abstraction morale. Il établit également un parallèle, époustouflant d'acuité, entre l'homosexualité (on disait l'inversion) de Proust et la pédérastie de Gide.

Les deux abordent des univers différents mais surtout s'éloignent dans leur attitude face au plaisir, face à l'amour. Dans l'immense intérêt qu'ils portaient au monde en général, Gide et Proust ont su inscrire leur « différence » comme le lien personnel et privilégié de l'exercice de la pensée et de l'écriture.


(1) Gide ou Le Courage de s'engager, de Ramon Fernandez, 1931

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