Une si belle arrière saison, Ursula Zilinsky
David, Toby et Félix : trois amis d'enfance. Les deux premiers sont anglais, le troisième allemand. Ils ont une dizaine d'années au début du siècle quand le livre commence avec le couronnement du roi Edouard VII.
Félix est l'héritier de la deuxième manufacture d'armes allemande.
Toby n'est pas à plaindre non plus puisque à la mort de son père (très porté sur « les jeunes cochers chaussés de grandes bottes et maniant le fouet »), il deviendra Lord Altondale, pair du royaume.
David n'a ni titre de noblesse, ni argent à espérer puisqu'il est fils de vicaire. Mais sa richesse n'est pas moindre car il est d'une beauté indécente. Dès l'école, d'ailleurs, « la beauté physique s'avérait aussi utile que de l'argent à la banque ou qu'un titre sur son papier à lettres ». À Oxford, il devient l'ami du jeune Lord Anthony Fielding, « une créature exquise l'air exsangue et langoureux d'un whippet dégénéré ». Mais c'est grâce à la rencontre de Lucas Ryder, un poète renommé proche de la soixantaine, que le destin de David prendra toute sa mesure. Il en devient le secrétaire particulier et bientôt l'amant. Leur amitié durera jusqu'à la mort de Lucas, quelques mois après la fin de la première guerre mondiale. Ce conflit atrocement meurtrier transformera David très profondément. « Le très joli dandy » deviendra grâce à son courage « le commandant David Harvey aux nombreuses décorations ».
Après l'insouciance et la joie de vivre des premières années du siècle, la guerre sépare Félix de ses amis et les cicatrices de la défaite allemande mettront longtemps avant de se refermer. Alors seulement la réconciliation pourra avoir lieu. L'amitié aura été la plus forte.
« Une si belle arrière saison » est excellent à plusieurs égards. On s'intéresse vite au destin de ces trois garçons et à celui de tous les personnages, très bien dessinés, qui les entourent. Si le roman n'échappe pas toujours à quelques lieux communs, force est de reconnaître que la description de certains milieux et de leurs mœurs est remarquablement accomplie : des écoles anglaises les plus huppées, dans le style d'Another Country, à la boue des tranchées.
Sans oublier cette place aussi éminente accordée à un personnage homosexuel décrit avec chaleur et sans excès de romantisme plus ou moins apitoyé.
■ Une si belle arrière saison, Ursula Zilinsky, Éditions Balland, 1985, ISBN : 271580511X