Stella Corfou, Beatrix Beck
Antoine Leroy et Stella Corfou se rencontrent aux Puces Matabois. Il cherche une lampe de caractère, elle est brocanteuse.
De ce hasard naît un amour fulgurant. Le trop sage chef du rayon bagagerie aux Galeries 2000 épouse peu après Gilberte Sanpart dite Stella Corfou, étoile filante, corps fou.
Au coup de foudre succède une passion démesurée, véritable culte d'Antoine pour sa prodigieuse divinité. Comme on entre en religion, il entre de plain-pied dans l'univers extravagant de l'ex-brocanteuse.
D'une beauté extraordinaire, Stella Corfou reste une enfant que la vie en société n'aurait pas disciplinée. Elle n'est pas immorale mais amorale, amie des chats errants et des âmes des morts, écrivain reconnu le temps de la publication de deux livres dont la verdeur est le reflet de sa propre existence : Merde à celui qui le lira et Classée X.
Lassés de la ville, les époux Leroy achètent une caravane et vont vivre leurs tumultueuses amours à l'abri des regards inopportuns. Au fil des jours, leur tendre idylle, pimentée de folie quotidienne, ne s'affadit pas.
Poussant jusqu'au bout sa résolution d'éviter de la vie tout désagrément, Stella Corfou, sentant la vieillesse approcher, convainc son mari d'en finir ensemble avec l'existence et la pesanteur terrestre.
Le suicide rate, mais peu après Antoine meurt d'un cancer. Dès lors, notre héroïne se réfugie dans la démence, s'identifie au défunt et n'a plus qu'une peur : être immortelle.
Ce récit d'une passion absolue est d'autant plus remarquable que Beatrix Beck le livre comme n'étant qu'une aventure plaisante, une farce burlesque.
Les éléments les plus tragiques, la mort, la folie, ne sont que des incidents absurdes dans un monde d'illusions. La dérision sauve du désespoir, l'extravagance permet d'éviter le pathétique. La fuite éperdue dans l'irréalité soustrait Stella Corfou au pressentiment de sa propre vacuité. C'est là le privilège des enfants et des fous, des innocents.
■ Stella Corfou, Beatrix Beck, Éditions Grasset, 1988, ISBN : 2246393817
Du même auteur : La prunelle des yeux - Recensement - Grâce - Un(e)