Les enfants des rues étroites, Abdelhak Serhane
Des années plus tard, le narrateur est revenu à Azrou, sa ville natale, au Maroc. Les souvenirs affluent : la misère ombrageuse de ses jeunes années, l'amitié indéfectible qui le liait aux gamins des rues étroites, les tentations des plus bénignes aux moins avouables.
Avec une émotion que le recul donné par un récit écrit à la deuxième personne aide à maîtriser, le narrateur revit les épisodes violents, les émois sensuels, quelques accrocs à la fierté de jeune mâle d'un adolescent marocain qui se sentait pris aux pièges des tabous d'une tradition séculaire et omniprésente et qui rêvait de son avenir doré dans un nouvel Eldorado, la France.
L'écriture rapide, sèche, véhicule le souvenir de secrets désespoirs : les nuits d'orgie et de débauche partagées avec Rahou, fidèle compagnon de ses jeunes années, le viol de la jeune Amina, dont s'est impunément rendu coupable le puissant Sid El Haj, la sacrée et toute puissante autorité du père qui comprend pourtant si mal les règles impitoyables d'un monde en pleine évolution.
Insidieusement, passé et présent se mêlent, la fin a rejoint le commencement, le narrateur se laisse engluer dans le souvenir, la mémoire toujours recompose les images d'une époque devenue lointaine, mais dont elle ne peut s'affranchir.
« Nous croyons être partis, alors que nous ne cessons de revenir. Le monde où nous vivons est fermé. »
Roman de mœurs et satire sociale, « Les enfants des rues étroites » est, avant cela, l'histoire d'un homme à la recherche de ses racines, de ses amitiés d'enfance que le temps n'a pas respectées.
■ Les enfants des rues étroites, Abdelhak Serhane, Éditions du Seuil/Points, 2002, ISBN : 2020564750