Jouissance coupable
Très vite, dans son histoire, le christianisme a développé cette idée que le plaisir est le plus grand des péchés. Les évangiles furent reconsidérées : il fallait que Marie fut vierge avant et après l'enfantement de Jésus.
On réinventa l'histoire de Marie, et la femme à cause de la tentation qu'elle représente pour l'homme, devint suspecte d'une manière encore plus catégorique que chez les Anciens qui lui refusaient un rôle social.
Dans le droit fil du péché originel, tout ce qui se rattachait au plaisir fut puni, en même temps qu'on excluait les femmes des lieux du culte jusqu'à préférer des castrats dans les chorales.
L'idéal, c'était un état impossible de célibat ou de mariage sans désir. Le coït interrompu par exemple était passible d'une peine aussi grande que le meurtre d'enfant. Toute "pollution" nocturne ou éjaculation (même dans le vagin) qui n'était pas à fin procréatrice devenait un acte criminel.
Pendant des siècles moines et doctes (dont ce cher Augustin divorcé et père d'un garçon adoré qui mourut à dix-huit ans), ergotent pour savoir exactement quand l'acte conjugal peut être pratiqué sans pécher.
Il faut comprendre que la masturbation et la sodomie (et par conséquent l'homosexualité) qui auraient permis la jouissance et la régulation des naissances, furent réprimées, passibles de lourdes peines (parfois exécutées). Au point que femmes et hommes encore aujourd'hui, les regardent comme perversions dégradantes.
Poids énorme des lois religieuses qui nous dictent toujours notre manière de jouir.
Une question pour finir :
Pourquoi l'homme se punit-il de jouir sexuellement, alors qu'il s'autorise si allègrement l'injustice, le crime et la guerre.
On pourra lire avec intérêt l'essai de Uta Ranke-Heinemann, Des eunuques pour le royaume des cieux : L'Eglise catholique et la Sexualité, Editions Hachette/Pluriel, 1992, ISBN : 2010190068