Francis Bacon : le corps indécidable
Francis Bacon est le peintre des corps sans organe.
Ses toiles sont froides et lyriques, charnelles et figées, vigoureuses en leurs forces arrêtées.
Une œuvre qui impose sa présence, mais aussi qui communique à tout être un excès de présence.
Cette présence n'a pourtant rien à voir avec la représentation, au sens d'une mise en place du figuratif.
C'est une peinture qui investit le corps. Elle libère l'œil – organe fixe et qualifié – de celui qui regarde.
Francis Bacon a-t-il pensé rendre visible la pure présence des corps ? A-t-il voulu approcher les corps en atteignant notre propre organisme ? En donnant aux corps représentés une allure excessive et spasmodique, a-t-il souhaité rompre les bornes de l'activité organique du spectateur ? Tenait-il à dissocier l'organe de sa fonction ? Représenter un corps sans organes afin d'approcher visuellement des sensations procurées par l'alcool, les drogues, ou, vécues par les schizophrènes, les sadomasochistes ? Faire découvrir le corps dans son indétermination ?
Francis Bacon – Trois études de personnages couchés dans un lit (détail) – 1972
Et, si l'étreinte, c'était l'accouplement des sensations diverses en deux corps, et non l'inverse ?
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