L'habillage du sexe reste toujours synonyme de gloire
Si le slip n'a plus la capacité exhibitionniste de l'étui, de la coque ou de la braguette, il est supposé convaincre – au partenaire amoureux – que sa vertu révolutionnaire réside surtout dans son caractère moulant.
Déjà dans les sociétés primitives, le porteur d'une peau animale avait la prétention d'hériter de la puissance de cette bête, tel Héraclès revêtu de la peau du lion ou les sectes contemporaines d'hommes-léopards ou d'hommes-panthères.
Le slip épouse les formes de l'homme : l'un et l'autre s'échangent leur sensualité. Cette adhésivité qui peut être parfaite entre le sexe et son tissu a d'ailleurs toujours fait l'objet des plus grands scandales et des plus vifs reproches ; c'est ainsi que la feuille de vigne a toujours été au centre de combats farouches. Jean-Claude Bologne en rend compte dans son Histoire de la pudeur et rapporte la citation suivante, tirée du Journal des innocents : « La pensée d'une feuille adhérente comme un polype au sexe d'une statue est plus indécente que toutes les pensées des grivois et des rieurs cyniques. »
Après de nombreux avatars, le slip se libère totalement à la fin des années 60 ; le tissu rétrécit, les fesses sont étroitement enserrées et la plupart du temps écartées, en deux disques bombés qui autorisent quelques suggestifs effets de transparence.
Le slip épouse les formes du corps et aux slips lâches d'antan on préfère les slips bien coupés d'aujourd'hui. Si le sexuel ne se déchiffre plus ouvertement sur le vêtement extérieur, il circule plutôt dans le discours publicitaire, la consommation étant désormais associée au pénis. Aujourd'hui, l'homme a le droit de s'occuper de son propre pénis, le plus souvent sous l'égide de la mode et des pouvoirs de représentation de la publicité qui fait du corps un fantôme de corps, un corps qui porte toujours la griffe des autres. Ce n'est plus le pénis qui bande, c'est littéralement le slip ; c'est la rhétorique publicitaire qui provoque l'introuvable érection.
Tant que ces effigies phalliques que sont les vêtements et sous-vêtements parviendront à ouvrir aux fantasmes l'accès à l'érotisme, à lui donner une forme tangible, il restera l'objet le plus aisément « sacralisable ».
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