Sur sainte Irène et saint Sébastien
La Contre-Réforme va lutter contre la beauté trop séduisante des représentations et notamment de celles de saint Sébastien. Un personnage nouveau fait alors son apparition : sainte Irène.
Auparavant une femme apparaît souvent dans des tableaux de groupe sous les traits de la Vierge dans toute sa divinité, hiératique. Sébastien est là sans qu'aucun lien l'unisse aux autres personnages, seulement présent dans l'extase.
Sainte Irène, elle, est la femme qui pleure, qui soigne le corps martyrisé. Elle est humaine, c'est la femme terrestre.
Son apparition dans les représentations du saint déplace dans le tableau même, la relation érotique au corps du martyr. Elle inverse, par son geste, selon Daniel Arasse, le mouvement des flèches, « en les retirant du corps, elle ôte ce qui est la marque d'un coupable regard sur ce corps ; la sainte femme soigne aussi notre regard en dénouant la fascination et en désamorçant l'effet en retour du corps visé (1) ».
Déplacement donc de la relation érotique. Le lien trouble n'est plus tout à fait entre le saint et le témoin mais entre sainte Irène (ou sa suivante) et saint Sébastien, dans la représentation.
(1) ■ extrait de « Le corps fictif de Sébastien » par Daniel Arasse, in Le Corps et ses fictions, sous la direction de Claude Reichler, Editions de Minuit, Collection Arguments, 1983, ISBN : 2707306479, page 65