Beauté de l'éphèbe par Goethe
Goethe, amoureux de la Grèce, était, comme Lord Byron, trop profondément Arcadien, pour ne pas en avoir laissé des preuves écrites. Comme l'illustre Anglais, l'illustre Allemand était sensible à la beauté de quelque sexe qu'elle fût. Lisez plutôt ce poème :
Dans l'éclat de l'aurore lisse
De quels feux tu m'as enflammé,
O mon printemps, mon bien-aimé,
Avec mille et mille délices !
Je sens affluer à mon cœur
Cette sensation suprême
De ton éternelle chaleur,
Beauté qui commande qu'on t'aime.
Que ne puis-je t'étreindre enfin
De ces bras que tu vois s'étendre
Ganymède contre ton sein !
Je demeure anxieux et tendre.
Les fleurs et l'herbe sous nos corps
Nous offriront leurs frais accords.
Qu'en l'ardeur de nous mieux connaître
Ta caresse vienne apaiser
La soif ardente de mon être
De la brise en fleur d'un baiser !
La voix du rossignol s'y mêle
Du fond des brumes d'alentour
Dans un suave appel d'amour
Je viens. Vois : l'azur se pommelle
Mais où nous joindre ? loin des yeux,
Cher Ganymède, dans les cieux !
Le vol des nuages se baisse,
S'incline devant ta jeunesse,
Sens la ferveur de mon émoi
Que sans fausse honte, sans crainte
L'étreinte réponde à l'étreinte,
Monte dans l'éther avec moi.
Eros, prends-nous sous les aisselles,
Que nous montions en notre toit
Nous serrer tous deux contre toi,
Dieu des amours universelles.
Goethe
Arcadie n°105, Traduction de Guillot de Saix, septembre 1962