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Harvey Milk : Non à l’homophobie, Safia Amor

Publié le par Jean-Yves Alt

Harvey Milk est un activiste qui a bien connu la vie politique et la vie des homosexuels de New York et de San Francisco, leur dessous et l'envers de leur décor.

Le récit de Safia Amor commence en août 1947, quand le grand-père d'Harvey Milk offre, à son petit-fils, « La perle », une nouvelle de John Steinbeck. Pour qui connaît cette fable, on devine que le parcours de Milk sera lié à la recherche d'une reconnaissance sociale… et que – jusqu'à sa mort – la jalousie, les convoitises, la haine ne manqueront pas de se dresser sur sa route.

Comme dans les souvenirs que l'on garde des contes pour enfants, Harvey Milk va faire – tout au long de sa vie – l'habituelle expérience des pensées brutes, sans aucune nuance intermédiaire entre le noir et le blanc, le bon et le mauvais, la grâce et le maléfice…

Harvey Milk évitera dès le début de son engagement militant, de se laisser embrigader dans des pensées exclusivement communautaires. Face au Président de l'association juive du campus où il est étudiant, il s'indigne qu'un étudiant non-juif ne puisse adhérer :

« Pratiquez les mêmes mesures discriminatoires que les autres et le monde tournera en rond ! » (p. 19)

Harvey Milk devant son atelier de photographie – 1977

Harvey Milk découvre très tôt que, dans leur vie sexuelle comme dans leur vie professionnelle, l'identité des personnes homosexuelles est un handicap. Elles sont à la merci du moindre contrôle de la police. Cette dernière en relevant les noms des homos raflés dans les bars, les lieux de rencontre, a pris l'habitude de les signaler aux personnes chez qui l'homo arrêté travaillait. On imagine la suite... (lire page 10)

Le récit de Safia Amor fait défiler sous nos yeux quelques événements de la communauté gaie de New-York et de San Francisco : les défilés new yorkais du Gay Power (p. 35), l'élection de Milk, en 1977, au Conseil Municipal de San Francisco dans l'équipe de George Moscone (pp. 48/59), tout le branle-bas de combat contre Anita Bryant, multiforme et joyeux (p. 68), la lutte contre la proposition 6 (pp. 67/71)

Avec justesse et délicatesse, la vie personnelle de Milk est abordée : le lecteur suit Scott, son compagnon de route, de vingt ans son cadet.

Milk Harvey fera les frais, tant dans sa vie personnelle que militante, du dégoût général provoqué par les diverses représentations de l'homosexualité. Car la vie continue de distiller ses poisons sous l'apparence huilée de son cérémonial. Le temps n'épure pas toujours la haine.

20 pages documentaires accompagnées de photographies tracent très rapidement la lutte des homosexuels pour affirmer leurs droits de citoyen : Magnus Hirschfeld, Pierre Seel, Robert Badinter, François Mitterrand, Louis-Georges Tin (journée mondiale de lutte contre l'homophobie), Barack Obama. Une bibliographie très incomplète et quelques adresses terminent le cahier documentaire.

A travers le portrait de ce militant, Safia Amor réussit à faire passer l'idée qu'une sensibilité homosexuelle, jamais figée, peut glisser d'une époque à une autre, reliant les années et les hommes. Un récit terrible d'amour et de haine qui colle à la peau et donne parfois le vertige. Une réussite.

■ Harvey Milk : Non à l’homophobie, Safia Amor, Editions Actes Sud Junior/Ceux qui ont dit non, septembre 2011, ISBN : 978-2742799282


Lire aussi la chronique de Lionel Labosse

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