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Le grand nulle part, James Ellroy

Publié le par Jean-Yves Alt

Le polar reflète souvent l'air du temps en s'appuyant sur des faits divers, récents ou anciens.

Los Angeles. Les années cinquante débutent par une série d'atroces crimes sexuels. Du « meurtre de fiotte », selon l'inspecteur Danny Upshaw. Mais l'affaire n'intéresse guère ses collègues, occupés à une chasse aux « Rouges », une « charrette pleine de mensonges collés les uns aux autres... un amas de conneries », selon les propos de Buzz Meeks, ex-flic corrompu à qui on ne la fait pas. Quant à Mal Considine, ambitieux lieutenant de la criminelle, sa seule motivation c'est le pouvoir et les facilités qu'il offre.

Anticommunistes, ces policiers ne sont pas dupes : « Toute cette combine n'était qu'un coup facile... Une mise en scène pour que les studios se gagnent encore plus d'argent et pour faire d'Ellis Loew un procureur et le gouverneur de Californie. »

Tous les moyens sont bons, même la collaboration de Mickey Cohen, gangster de Los Angeles qui arrose les flics et fournit des gros bras aux producteurs contre le syndicat des figurants.

Le grand nulle part, James Ellroy

Mais l'homosexualité de quelques scénaristes du PC et les souvenirs d'une affaire où furent mêlés des dirigeants syndicaux et plusieurs victimes du tueur amènent Danny Upshaw à trouver un lien entre deux dossiers apparemment indépendants.

Impitoyable description de l'Amérique puritaine et répressive des années cinquante, « Le grand nulle part » est un roman, où le tragique domine.

Robert Deleuse, qui semble détester Ellroy, le soupçonne de penser comme ses personnages : il relève dans « Les maîtres du roman policier » (Bordas, 1991, ISBN : 978-2040195571, pp. 218-219) des déclarations provocatrices du style : « J'ai écrit ce roman contre les communistes et les homosexuels » ou « Je suis pour la peine de mort » ou encore : « Mes livres reflètent l'angoisse de l'Américain moyen, blanc, anglo-saxon, protestant, de droite et hétérosexuel ». Mais pourquoi diable tant insister sur la revendication de son... hétérosexualité ?

Ce polar néanmoins réussi interroge sur l'idéologie sécuritaire de son auteur. Voilà un roman à lire, mais en toute lucidité.

■ Le grand nulle part de James Ellroy, Editions Rivages/Noir, 638 pages, 1991, ISBN : 978-2869304673


Du même auteur : Clandestin - Le dahlia noir

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