Mon regard sur une sculpture de saint Sébastien à Colmar (fin XVe)
Il n'est pas triomphant ce Sébastien.
Il m'évoque un Christ aux outrages.
Le sculpteur n'a pas choisi d'associer le culte de Dieu à celui de la chair, non pas par manque de virtuosité technique : le drapé admirable, qu'il a réalisé, le prouve.
Et, si le torse de Sébastien est nu, le sculpteur a pris soin – encore – de le « vêtir » avec quelques restes de bubons pesteux.
C'est que le corps de Sébastien, dans cette sculpture, s'offre comme le lieu de rencontre de deux fléchages antagonistes : le visible et l'invisible…
… le montré et le caché.
Saint Sébastien – vers 1470-1480
Tilleul (revers évidé), Rhin supérieur (?), Musée d'Unterlinden, Colmar
Le visage même de ce saint – d'une singulière beauté – est voilé par cette incommensurable tristesse.
Le message n'en est que plus clair : il s'agit de rompre le jeu, peu innocent, qui se trame entre le martyr et le témoin qui prie.
Un Sébastien vu comme libérateur des convoitises de la chair. Et, qui invite à abandonner les apparences terrestres…
Étonnant !