Quand la peinture rend les choses plus belles par Lucian Freud
C'est un lavabo vieux, sale, dont la blancheur immaculée a disparu depuis longtemps. Il a deux robinets dont le cuivre brille encore. De l'eau s'écoule avec des effets de miroitement. Mon œil ne peut s'empêcher de suivre cette eau jusqu'à la bonde, constatant que l'écoulement se produit sans difficulté. La peinture des tuyaux s'est détachée par plaques entières tandis que la porcelaine du lavabo s'est recouverte, ici ou là, de traces de calcaire. Quelques carreaux – certains sont cassés – ont conservé leur éclat originel. Deux ébauches de lutteurs de sumo ont été oubliées ( ?) par le peintre.
« Quelle vanité que la peinture qui attire l'admiration par la ressemblance des choses dont on n'admire point les originaux », écrivait Pascal.
Lucian Freud – Deux lutteurs japonais et lavabo – 1983/1987
Huile sur toile, The Art Instituts of Chicago
Lucian Freud (petit-fils du fondateur de la psychanalyse) a réalisé là un fabuleux tableau. Très sensuel. Je pense au peintre et aux hommes qui ont utilisé ce lavabo pendant tant d'années.
Comment ne pas être émerveillé par cette nature morte si belle à contempler alors que sa réalité ne doit supporter aucune comparaison avec – par exemple – le bosquet des trois fontaines du château de Versailles ?
Secret de la peinture…