L'énigmatique Luca Signorelli
Les femmes hurlant de terreur, les démons crispés sur les corps nus des damnés, les cadavres des hommes terrassés par la fureur du ciel que Signorelli a peints dans la chapelle Saint-Brizio à Orvieto incitent à voir en lui le visionnaire à l'imagination frénétique, morbide, et d'un irrémédiable pessimisme que les romantiques ont reconnu.
En ignorant la douceur du coloris et la souplesse des formes, Signorelli sait jeter sur la nudité masculine un regard savant et amoureux.
Il est certes possible de faire une lecture homosexuelle sublimée de ses fresques. J'aime aussi regarder Signorelli avec un autre regard, m'attacher au lyrisme des formes, ressentir le tragique de certaines scènes religieuses, lire l'énigmatique message d'une émotion vagabonde.
Ses représentations de ces étranges « mondes intermédiaires », partagées entre le rêve du réel et le cauchemar de la folie, m'évoquent aussi le peintre Füssli.
Luca Signorelli – Les damnés / Résurrection (détails) – entre 1499 et 1502
Fresques, cathédrale d’Orvieto, chapelle San Brizio
Comment ne pas être effrayé par la fresque des « Damnés », véritable bourbier de corps convulsés, en proie aux démons, tandis que la « Résurrection » est, tout au contraire, un rêve de béatitude donnant aux corps masculins l'impulsion magique d'une danse.