Amour nuptial, Jacques de Lacretelle (1929)
Ce roman dit le tragique destin d'un couple. Le mari conte l'histoire, et Lacretelle l'entoure de tant de détails empruntés à sa propre vie, le figuier d'Aiguesbelles, Silbermann, ses romans, que le livre a l'attrait direct d’une confidence.
Le roman suit les progrès de l'aversion qu'éprouve à l'égard de sa femme ce romancier, tyrannisé par ses besoins intellectuels ; dessèchement de la sensibilité, règne d'un cruel égoïsme.
Le mari dissocie les plaisirs de la chair et ceux de l'âme ; il souffre de devoir à sa femme à la fois les uns et les autres ; dans cet état de trouble, il hait ses liens, il hait toutes les qualités de sa femme, cherche à détacher d'elle l'idéal qu'il s'est formé pour lui seul, ne se sent heureux que lorsqu'une maladie empêche Élise d'être physiologiquement sa femme ; mais la femme ne peut supporter cet amoindrissement, et elle meurt.
L'Amour nuptial évoque L'Immoraliste d' André Gide par la sévérité de l'analyse et la netteté des notations, avec une défiance des images et de la rhétorique. Jacques de Lacretelle maintient discret une sensibilité qui affleure à chaque page. Dans la forme, Lacretelle se distingue par le goût du récit bien fini, sans défaut, sans rien qui choque ou qui surprenne ; sa pudeur de cœur s'étend aux images, aux mots, dans un parfait bon ton.
■ Amour nuptial, Jacques de Lacretelle, Éditions de La Nouvelle Revue Française, Librairie Gallimard, janvier 1929
Du même auteur : Silbermann - La Bonifas