La trêve, Mario Benedetti
Violence et rejet du fils homosexuel
Avec La Trêve de Mario Benedetti, nous prénétrons dans un roman intimiste, à l'écriture retenue. Martin Santomé a cinquante ans. Dans quelques mois, il va prendre sa retraite et quitter son travail routinier d'employé de commerce. Personnage terne à la vie sans joie, il est veuf et père de trois enfants, deux fils, Esteban et Jaime, et une fille, Blanca.
Un jour, une jeune fille de vingt-quatre ans, Laura Avellaneda, est affectée à son service. Son intérêt, d'abord lointain, se fait plus précis et ne tarde pas à se muer en amour pour elle. Ils vivront, l'espace de quelques mois, une relation tendre et discrète, sensuelle des menus événements de sa vie quotidienne.
La solitude, le cours du temps qui passe sont exprimés avec une pudeur et une délicatesse qui donnent à ce portrait d'un homme en proie au doute une charge émotionnelle intense.
A côté de cette passion pour Avellaneda, Martin Santomé apprend avec horreur et stupéfaction que Jaime, son fils, est pédé.
Sa réaction, très macho latin, incite Jaime à quitter le domicile familial plutôt que d'affronter son père, alors même qu'il arbore un œil au beurre noir dû à la fougue vengeresse de son frère.
Même si cet épisode semble sans grande importance en regard de l'amour de Martin Santomé pour sa jeune maîtresse, il est tout de même symptomatique de noter l'extraordinaire changement de comportement d'un homme qui abandonne toute délicatesse pour parler ainsi de son fils :
« J'aurais préféré qu'il devienne voleur, morphinomane ou débile mental [...]. Justement lui, celui que j'aimais le plus. Pas de pitié. Ni maintenant, ni jamais. »
■ La trêve, Mario Benedetti, Editions Belfond, 1996, ISBN : 2714434649