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James Baldwin ou le devoir de violence, Njami Simon

Publié le par Jean-Yves Alt

A vingt ans, James Baldwin (1924-1987) quitte Harlem pour Greenwich Village après avoir été prédicateur. Commence pour le jeune homme noir et homosexuel ce qu'il nommera son « devoir de violence ».

Contre un triple racisme qui le persécute tout enfant à travers la pauvreté de sa famille, la couleur de sa peau et ses préférences sexuelles, l'auteur de Giovanni's Room (Giovanni, mon ami) et de Going to Meet the Man (Face à l'homme blanc) devient le porte-parole de ses frères avilis. Cela pose quelques problèmes. Il se débat entre le « rôle » qu'on l'entraîne de plus en plus à jouer et le temps d'écrire.

Son œuvre – remarque à juste titre son biographe Njami Simon, Noir africain – n'a pas atteint l'ampleur que Baldwin écrivain aurait pu lui insuffler. James Balwin lui-même en a conscience :

« Ce que l'on écrit, on ne peut le puiser que dans sa propre expérience... C'est là la seule préoccupation de l'artiste : recréer, à partir du désordre de la vie, cet ordre qui est l'art. Donc, pour moi, la difficulté d'être un écrivain noir venait de ce qu'en fait les terribles exigences et les risques très réels de ma situation sociale m'interdisaient d'examiner ma propre expérience de trop près. »

Dilemme difficile à gérer. L'ostracisme peut venir de « l'intérieur » comme ce fut le cas pour James Baldwin : certains activistes du Black Power l'accusent de ne « pas s'aimer en tant que Noir, ni en tant que mâle. »

James Baldwin vient en France, s'y installe à la fin de sa vie, s'adonne de plus en plus à l'alcool, entre dans les honneurs (Légion d'honneur par Mitterrand en 1986) et la maladie.

Homme complexe, il se plaît à raconter le « viol » qu'il subit (sans pénétration) à treize ans et dit avoir combattu l'autorité du père en prenant le contre-pied de sa morale sans jamais se défaire de son catholicisme d'origine.

James Baldwin est admirablement « retrouvé » dans cette biographie, travail inspiré et loyal d'un autre écrivain qui « aime » Baldwin mais explique qu'une « biographie ne signifie pas tresser une jolie couronne mortuaire. C'est souvent le moment idéal pour soulever et mettre à jour les contradictions d'un personnage, l'opposition de son image publique avec son image privée, l'incohérence, parfois, entre ses prises de position et ses actes [...] la vraie personnalité de Jimmy, qui est la synthèse de tous les rôles que la vie a pu lui faire tenir. »

■ James Baldwin ou le devoir de violence, Njami Simon, Biographie/Seghers, 1991, ISBN : 2232102475

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