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Sur saint Sébastien (2/3)

Publié le par Jean-Yves Alt

« Les spectacles lascifs d'hommes [nus] peuvent contaminer l'esprit des femmes. C'est pourquoi on fait à saint Sébastien, quand il est attaché à son arbre et criblé de flèches, les membres tout colorés et couverts du sang de ses blessures :

car il ne faut pas qu'il se montre nu, beau, charmant et blanc comme il l'était, et comme le peignit jadis Fra Bartolomeo qui le fit si beau et si lascif que les femmes et les jeunes filles qui allaient à confesse le voyaient et en tombaient amoureuses avec la plus grande ardeur ; si bien qu'il fallut l'ôter de l'église et l'envoyer à François, roi de France. »

Giovanni Paolo Lomazzo

■ extrait de « Le corps fictif de Sébastien » par Daniel Arasse, in Le Corps et ses fictions, sous la direction de Claude Reichler, Editions de Minuit, Collection Arguments, 1983, ISBN : 2707306479, page 63

Lire la 1ère partie - la 3e partie

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Sur saint Sébastien (1/3)

Publié le par Jean-Yves Alt

« Ce corps d'athlète gracieusement déhanché, percé de flèches, comme abandonné dans une agonie délicieuse et lascive, je conçois sans peine que des générations de jeunes hommes épris, dans le secret de leur cœur, de leurs semblables, l'aient caressé du regard, palpant chacun de ses muscles.

Au fond de chapelles baignées d'une lumière crépusculaire et embrumées d'encens, ces rêveurs de violentes étreintes s'abîmaient, pâmés dans le remords d'une culpabilité distillée avec une minutie exquise. »

Michel del Castillo, Le plaisir de mourir

■ in Adonis et martyr, saint Sébastien, Editions Persona, 1983, ISBN : 2903669163, page 13

Lire la seconde partie

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Regard et champ amoureux par Roland Barthes

Publié le par Jean-Yves Alt

« Dans le champ amoureux, les blessures les plus vives viennent davantage de ce que l'on voit que de ce que l'on sait. »

Roland Barthes

■ in Fragments d'un discours amoureux, chapitre "Images", Editions du Seuil/Tel Quel, 1977, ISBN : 2020046059, page 157

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« Tas d'os » par Egon Schiele

Publié le par Jean-Yves Alt

Dans les peintures très graphiques, il y a des éléments visuels – en petit nombre – qui me permettent ainsi d'en éprouver une force décuplée.

Comme dans les dessins d'Egon Schiele (1890-1918), ce peut être une peau veloutée ou des mains osseuses.

Ces mains cartilagineuses, aux couleurs terreuses et aux ongles blancs, me semblent sortir des profondeurs de la terre.

Elles sont comme un rappel du squelette qui se cache derrière la chair.

Egon Schiele, Portrait d'un gentleman [détail], 1910

Sorties d'une manche, elles semblent ricaner devant moi. A l'image des crânes, dans les peintures des vanités du XVIIe, elles me rappellent, dans cette pose spectrale, que la mort approche.

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L'homosexuel vu par Anaïs Nin

Publié le par Jean-Yves Alt

L'homosexuel craint la totalité, l'absolu en amour. Il distingue donc le physique de l'amour. Mais maintenant je constate que par suite de ma sympathie et parce que je rencontre chez l'homosexuel les mêmes hostilités et les mêmes rébellions envers celui des deux parents qui se montre dominateur, possessif, volontaire, j'éprouve de la sympathie pour leur manière perverse de circonvenir la relation homme-femme. [...]

Nous projetons sur autrui le Moi que nous ne pouvons supporter, afin de pouvoir le détester chez les autres et le détruire. Ces éléments condamnés sont nécessaires à la vie. Lorsqu'on les tue, on tue la vie. Mais l'idéal en moi les niait. Tout chez moi est contrôlé et passe par des voies détournées. Je le vois maintenant. [...]

Je ne sais si cela tient au fait que je connais tellement d'artistes qui ont été définis par Baudelaire comme étant homme, femme et enfant à la fois, ou bien des adultes qui n'ont jamais détruit en eux la vision fraîche de l'enfant, mais ce que je vois chez l'homosexuel est différent de ce que les autres y voient. Je ne vois jamais la perversion, mais plutôt quelque chose d'enfantin, une pause dans l'enfance ou l'adolescence lorsque l'on hésite sur le seuil du monde adulte. La relation fondée sur l'identification, la ressemblance ou « le double », sur le narcissisme, est un choix plus facile et moins exigeant que celui entre les hommes et les femmes. C'est presque incestueux, comme un lien de parenté. Il est vrai qu'il peut y avoir chez l'un davantage de traits masculins, et chez l'autre davantage de traits féminins, de sorte qu'ils peuvent s'équilibrer ou se compléter. Mais chaque fois que j'ai rencontré un homosexuel, ce que j'ai trouvé c'était de l'infantilisme. Il y avait souvent aussi une parodie des parents et des grands-parents, un attachement au passé, un amour des objets anciens, toujours une fixation sur la préadolescence lorsque nos inclinations sexuelles ne sont pas encore cristallisées et toujours quelque événement traumatisant qui provoquait la peur de la femme, d'où la haine à son égard.

Anaïs Nin

■ in Journal 1944-1947, Editions Le Livre de Poche, 1978, ISBN : 225301611X, pages 208 à 210

 

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