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Mon regard sur un canivet représentant saint Sébastien

Publié le par Jean-Yves Alt

L'incontestable mérite de saint Sébastien est de ne jamais me laisser indifférent.

Son hagiographie pieuse et chromo saint-sulpicienne, particulièrement présente dans ce canivet (1) focalise – ici encore – pour moi, deux extrêmes de la pensée : d'une part, la vénération et d'autre part, ce credo du corps et de ses équivoques avatars.

Car même dans cette image innocente, Sébastien est toujours support [ou prétexte seulement ?] à mon imaginaire. Il m'habite comme la folle du logis.

Sébastien est ici un doux adolescent / une douce adolescente : son corps est indistinct. Corps de l'androgyne qu'on retrouve dans celui de Gustave Moreau ou dans les pastels hermaphrodites d'Odilon Redon.

Figure impassible et tout à la fois d'une très grande douceur, ce Sébastien, toujours debout alors même que les flèches ont constellé son torse, ne semble pas avoir besoin de l'arbre pour se tenir debout.

Anonyme – Saint Sebastianus – Canivet du XVIIe siècle

20,5 cm x 15,5 cm, montage de l'époque sur carton épais recouvert de papier bleu, collection particulière

[Pour voir le canivet entier, cliquer sur l'image]

Le linge qui ceint ses hanches invite à peu de désir (même si, au niveau du sexe, il fait saillie) ; tissu fantasmagorique dans mon seul esprit. La dentelle de papier qui enserre Sébastien, toute terrestre soit-elle, est un signe précurseur du jardin céleste vers lequel son regard est tourné. Sébastien fait déjà partie d'un autre monde qui dépasse sa sobre enveloppe charnelle.

Moi qui le chéris tant, il me reste à collectionner jalousement ses flèches…


(1) Les canivets sont des images pieuses en dentelle de papier, réalisées, avec un minuscule couteau et rehaussées de gouache, le plus souvent par des religieuses. Ils disparaissent au XIXe siècle pour laisser place aux images en dentelle mécanique.

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