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Benito Cereno, Herman Melville (1855)

Publié le par Jean-Yves Alt

L’œuvre la plus admirée entre tous les écrits de Melville, celle qui, n'eût-il rien laissé d'autre, suffirait à lui assurer l'immortalité, est sans doute Moby Dick.

Moby Dick (1851) est d'abord un roman américain du XIXe, - le roman des chasses à la baleine, avec tous ses rituels, depuis l'armement du navire jusqu'à la poursuite du cachalot aperçu à la surface de l'océan et à la plongée dans les barils du bord de la précieuse huile. Cependant Moby Dick contient beaucoup plus qu'un magnifique passionnant roman d'aventures. C'était aussi et surtout une admirable épopée mystique, une allégorie religieuse, un roman métaphysique, dominé par les grands problèmes de la destinée humaine, du Bien et du Mal.

Benito Cereno est certainement la plus frappante des nouvelles écrites par Herman Melville. Ce récit est emprunté aux souvenirs du capitaine Delano, publiés en 1817.

Aux alentours de 1799, le capitaine Delano, un honnête marin yankee, se trouve à l'ancre près de la côte du Chili. Il aperçoit à quelque distance un navire espagnol en détresse, le San Dominick. Il monte à bord, a un entretien avec le capitaine du San Dominick, Benito Cereno. Ce dernier est, selon toutes apparences, un homme fier, mais malade, sans doute mentalement dérangé et ayant besoin d'être soutenu constamment par le nègre Babo.

Delano écoute le récit tragique du capitaine : le scorbut et les tempêtes ont fait périr la plus grande partie des passagers et de l'équipage.

Delano, cependant, est surpris et vaguement inquiet par la présence à bord de nombreux nègres qui aiguisent leurs haches, par les efforts vains de quelques matelots blancs pour lui parler en privé, par l'attitude ambiguë, la nervosité et les réserves du malheureux capitaine.

Lorsqu'il quitte le vaisseau, le mystère se dénoue. Benito saute dans le canot américain, suivi de près par le nègre Babo qui essaie de le poignarder : le capitaine était prisonnier à bord des nègres mutinés qui avaient tué la plupart des Blancs. Benito Cereno avait dû jouer un rôle, sous les yeux du nègre Babo qui surveillait ses moindres gestes pendant toute la conversation avec Delano.

Benito Cereno est un récit admirablement mené et profondément angoissant. Ses pages offrent une perfection dans la technique, une intensité d'atmosphère et une qualité de suspense qui font de Melville l'égal d'un Joseph Conrad.

■ Benito Cereno, Herman Melville (1855), Editions Gallimard/Folio bilingue, 1994, ISBN : 2070388182


Du même auteur : Billy Budd Matelot - L'érotisme dans Moby-Dick

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